Chawki Gaddes : Sans cadre juridique, la surveillance par caméra dans les rues de Tunis est illégale

05/05/2016

Le président de la Commission nationale de la protection des données personnelles, Chawki Gaddes, était l’invité d’Express Fm  ce jeudi 5 mai 2016 en présence du journaliste  Sofien Ben Hamida.

Son passage a été l’occasion de revenir sur la décision du ministère de l’Intérieur d’installer des caméras de surveillance dans certaines artères du Grand-Tunis. Décision qui  répond à un objectif de sûreté nationale qu’il ne s’agit pas de contester mais qui comporte cependant  un grand nombre de problématiques sur lesquels le président de la Commission s’est arrêté.

 

Chawki Gaddes qui s’est exprimé en tant qu’expert en matière de données personnelles et non  en tant que président de la Commission nationale de la protection des données à caractère personnel  a démontré l’existence de clivages entre le projet du ministère de l’Intérieur d’installer des caméras de surveillance  et la loi sur la protection des données à caractère personnel.

 

En effet, la loi organique du 27 juillet 2004 portant sur la protection des données à caractère personnel contient un chapitre relatif à la surveillance par caméras. Ce chapitre ne s’applique qu’aux particuliers et non aux ministères et structures administratives. Il s’agit là d’une des premières nuances à apporter au projet ministériel, selon l’expert en données personnelles.

 

En deuxième lieu, il nous fait remarquer qu’il existe un vide juridique flagrant pour encadrer le projet en question. En d’autres termes et toujours selon l’expert, le projet ministériel a précédé la loi et  tant qu’aucune loi ne viendra encadrer ce projet il restera lettre morte.

 

En l’absence de texte juridique, c’est à la Constitution située au sommet de la hiérarchie des lois qu’il faut se référer. En l’espèce et comme l’indique Chawki Gaddes il s’agit de l’article 24 de la Constitution qui énonce que les données personnelles des citoyens jouissent  d’une protection prévue par le constituant.

Face aux deux impératifs, de sûreté nationale, d’un côté et de protection des données, de l’autre Chawki Gaddes nous énonce qu’il faut trouver le juste milieu pour faire respecter les deux impératifs.

 

Le président de la Commission a  insisté sur le fait  que l’installation des caméras de surveillance est une nécessité d’ordre public car dans le contexte actuel de lutte contre le terrorisme  ces caméras permettront d’incriminer tout les types d’actes criminels : actes de vandalisme, jet de poubelles et détritus sur la voie publique) cependant il est vital pour la viabilité du projet qu’une loi intervienne pour l’encadrer.

Durant l’entretien, Sofien Ben Hamida a soulevé la problématique du lieu où ces caméras seront installées car en effet, comme il le précise lui-même, l’article 70 de la Constitution énumère limitativement ces lieux et la voie publique ne fait partie des dispositions de la loi. IL faut donc amender cette loi et légiférer en ce sens.

 

Enfin, Chawki Gaddes a révélé sur les ondes qu’il s’entretiendra avec le chef du gouvernement cet après midi pour élaborer ce futur texte de loi ; en ajoutant «  Nous veillerons nuits et jours pour que cette loi voit le jour ».

Le président de la Commission a également insisté sur le fait que l’installation des caméras sur la voie publique est conditionnée par l’obligation d’information des citoyens à ce sujet. En d’autre terme on ne peut surveiller les citoyens sur la voie publique qu’après les avoir informé de cette surveillance

En deuxième lieu, les citoyens doivent pouvoir accéder à leurs données personnelles. Ce droit d’accès à nos propres données personnelles est également un des corollaires à la réalisation du projet.

Enfin, il a été soutenu que  l’exploitation de ce procédé ne doit pas être abusive.  L’utilisation des caméras doit être avant tout sécuritaire et non policière.

 www.businessnews.com.tn

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