Diplomatie économique : le cheval de bataille
23/03/2014
Obama et Jomâa discuteront de l’assistance que fourniront les USA à la Tunisie aux plans économique, politique et sécuritaire
Le chef du gouvernement provisoire Mehdi Jomâa se rendra aux États-Unis d’Amérique, où il sera reçu vendredi 4 avril par le président Barack Obama. Selon le service de presse de la Maison-Blanche, le président Obama « attend avec grand intérêt de discuter de l’engagement pris par la Tunisie pour faire avancer la démocratie et voir comment les Etats-Unis peuvent appuyer davantage la transition historique de la Tunisie ».Les deux hommes aborderont de nombreux sujets à enjeux bilatéraux et régionaux et des questions d’intérêt commun dont notamment l’assistance à fournir à la Tunisie au niveau économique, politique et sécuritaire en soutien aux programmes de réforme engagés par Mehdi Jomâa et à la stabilité de la Tunisie, lit-on encore dans le communiqué de presse publié mercredi sur le site de l’ambassade US en Tunisie.
La visite de Mehdi Jomâa aux USA témoigne des solides liens d’amitié entre les peuples américain et tunisien ainsi que de l’engagement américain marqué en faveur de la transition démocratique en Tunisie, souligne-t-on de même source.
Porté à la tête de la présidence du gouvernement, il y a moins de deux mois, Mehdi Jomâa s’était fixé d’emblée pour objectif majeur de dynamiser l’économie et de booster la croissance. Après avoir diagnostiqué début mars « une situation économique difficile qui risque de s’aggraver si des mesures d’urgence ne sont pas prises », Jomâa a décliné trois objectifs principaux: création d’emplois à travers l’encouragement de l’initiative et le développement des microentreprises, la promotion de l’investissement privé dans les régions de l’intérieur et l’accélération du rythme de réalisation des projets régionaux encore en souffrance ».
A cette fin, Jomâa semble faire de la diplomatie économique le cheval de bataille de son gouvernement. En insistant sur l’apport de ce volet à l’essor économique de la Tunisie, il a annoncé début mars, dans un entretien télévisé, son intention de donner de la densité à ses contacts avec des pays frères et amis.
Le Golfe, un potentiel à mettre du côté de la Tunisie
Fort de cette conviction, le chef du gouvernement a effectué une tournée dans les pays du Golfe (15/19 mars) qui l’a conduit tour à tour aux Émirats Arabes Unis, en Arabie Saoudite, au Qatar, au Koweït et à Bahreïn.
Le maître mot de la visite de Jomâa dans les pays du Golfe était « la promotion de la coopération économique bilatérale». Aux EAU, le message du gouvernement était clair : donner un nouvel élan aux relations bilatérales « rafraîchies » durant la dernière période suite à des divergences de vues au sujet de certains évènements. Les relations tuniso-émiraties ont été, en effet, marquées en 2013 par le retrait de l’ambassadeur émirati à Tunis qui n’a repris son poste qu’en février 2014.
Cette visite avait donc pour objectif de délivrer un message rassurant, à savoir que la situation en Tunisie s’améliore sur le plan politique et sécuritaire et que le terrain était favorable au retour des investissements dans le pays. La visite de la délégation gouvernementale tunisienne en Arabie Saoudite, deuxième étape de son périple dans le Golfe, a été qualifiée de « fructueuse » par le ministre de l’Économie et des Finances Hakim Ben Hammouda qui a fait part de la disposition de la partie saoudienne à concrétiser les intentions d’investissement en projets et conventions. Une bonne partie de l’entretien qu’a eu Jomâa avec le deuxième vice-président du Conseil des ministres saoudien a été consacrée aux affaires économiques, avait-il précisé.
A Doha, la rencontre de Jomâa avec l’Émir de l’État du Qatar cheikh Tamim Ibn Hamad Al-Thani a porté en priorité sur les dossiers économique et sécuritaire. Selon un communiqué de la présidence du gouvernement, l’Émir du Qatar a assuré qu’il veillera à inciter les hommes d’affaires qataris à investir en Tunisie. Les promesses du Qatar envers la Tunisie ont été faites par le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur qatari qui a fait part de la disposition de son pays à apporter son appui financier et commercial à la Tunisie.
La visite de quelques heures de Jomâa au Koweït, quatrième étape de sa tournée dans le Golfe, et au cours de laquelle il s’était notamment entretenu avec l’Émir de l’Etat du Koweit, cheikh Sabah Al-Ahmed Al-Jaber Al-Sabah, avait pour but de «promouvoir les relations bilatérales selon une approche stratégique », avait-t-on souligné de source diplomatique tunisienne. Au menu de la visite, des rencontres avec des représentants de la Chambre de commerce et d’industrie, le directeur général adjoint du Fonds koweïtien pour le développement et le représentant de l’Instance générale des investissements. A Bahreïn, ultime étape de la tournée de Jomâa dans les pays du Golfe, le chef du gouvernement a mis l’accent lors de ses rencontres avec le Premier ministre bahreïni cheikh Khalifa Ibn Salmane Al-Khalifa et le Prince héritier Salmane Ibn Hamed Al-Khalifa, sur les moyens de promouvoir les investissements dans les deux pays et de développer les échanges commerciaux tuniso-bahreïnis.
Cette tournée qui, selon Hakim Ben Hammouda, vise à promouvoir les relations de la Tunisie avec les pays du Golfe et à les élever à des paliers supérieurs, a permis, selon ses termes, de relever l’intérêt accordé par ces pays à la Tunisie ainsi qu’une importante disposition à lui apporter tout le soutien nécessaire qui sera concrétisé au niveau politique, économique et sécuritaire. Dressant le bilan du périple que le chef du gouvernement vient d’effectuer à travers cinq pays du Golfe, le ministre des Affaires étrangères, Mongi Hamdi, a fait état, au cours d’une conférence de presse tenue vendredi à Tunis, des bonnes dispositions exprimées par les pays du Golfe en vue de venir en aide à la Tunisie, citant en particulier les EAU, le Qatar et le Koweït.
Le montant de l’assistance financière qui sera accordée à la Tunisie par ces trois pays sera fixé lors des prochaines réunions des commissions mixtes respectives, a-t-il précisé. Cette importante offensive diplomatique à laquelle s’essaie le gouvernement, sera suivie d’une nouvelle tournée qui conduira Mehdi Jomâa à Paris et à Washington fin mars-début avril.
La visite de Jomâa à Paris aura lieu le 31 mars et le 1er avril. Selon la présidente de l’organisation patronale, Wided Bouchamaoui, qui fera partie de la délégation officielle tunisienne, «cette visite permettra de débattre de la situation économique en Tunisie et d’examiner les opportunités de coopération entre la Tunisie et la France sur la base d’une stratégie gagnant-gagnant ».
Pour rappel, François Hollande avait effectué les 4 et 5 février 2013 une visite en Tunisie, la première d’un président français après la révolution. La France est le premier partenaire commercial (premier client et premier fournisseur) et industriel de la Tunisie. Le 7 février 2014, Hollande est revenu en Tunisie pour assister à la cérémonie solennelle marquant la célébration de la promulgation de la nouvelle Loi fondamentale la qualifiant de «texte majeur » qui établit un régime républicain, démocratique et participatif dans le cadre d’un Etat de droit.
Engagement US à lancer un partenariat stratégique avec la Tunisie
L’annonce de la visite qu’effectuera Jomâa aux USA (du 2 au 4 avril) a été annoncée, elle, bien avant. Dès l’annonce du vote de confiance de l’Assemblée nationale constituante au nouveau chef du gouvernement élu le 29 janvier 2014 à 149 voix sur 193 votants, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, avait assuré dans une déclaration publiée le même jour sur le site de l’ambassade des États-Unis d’Amérique à Tunis : « J’ai hâte de travailler avec le Premier ministre Jomâa et son équipe en cette période cruciale ». John Kerry avait fait part également de la disposition des États-Unis à continuer à « soutenir la transition de la Tunisie vers une démocratie durable dans laquelle les droits de tous les Tunisiens seront respectés et protégés ».
Le 18 février dernier, lors d’une brève visite en Tunisie, Kerry avait annoncé, lors d’un point de presse, avoir convenu avec Jomâa de tenir la première réunion de dialogue tuniso-américain au cours de la visite de Jomâa à Washington. Le dialogue stratégique, avait-il alors expliqué, vise à raffermir les relations bilatérales et se focalisera sur la coopération sécuritaire et sur l’instauration de relations économiques solides entre les deux pays.
De même, Barack Obama s’était entretenu au téléphone avec Jomâa début février pour le féliciter à la suite de son investiture à la tête du gouvernement de transition. Au cours de sa visite à Washington, Jomâa aura une série de rencontres avec des responsables au sein de l’administration américaine et du Congrès américain ainsi qu’avec des hommes d’affaires et des chefs d’entreprise, indique un communiqué de la présidence du gouvernement. Cette visite a pour enjeu déclaré de développer le partenariat entre les deux pays en cette phase de transition afin d’aider la Tunisie à réussir son processus de transition, souligne-t-on de même source
Lapress.tn