Égalité hommes-femmes: L’islamologue syrien Mohamed Shahrour “félicite le peuple tunisien” et salue “cette lueur d’espoir”
24/08/2017
“La Tunisie, et ses nouvelles lois”, c’est le titre du nouvel article du Syrien Mouhamed Shahrour, spécialiste du texte coranique, paru dans le “News Syrien”. Un texte dans lequel il revient sur les nouvelles propositions lancée par le président de la République Béji Caïd Essebsi et portant notamment sur l’égalité en matière d’héritage et le mariage des tunisiennes avec des non-musulmans.
Connu pour ses positions critiques à l’Islam politique et aux pensées islamistes rigides, Shahrour a qualifié d’audacieuse l’intention de la Tunisie d’adopter de nouvelles lois en faveur de la femme. Il a expliqué qu’initier le débat sur ces questions fragiles ne peut que briser le tabou et déclencher, entre autre, une nouvelle vague d’indignation sous prétexte de violer les préceptes de l’Islam et dévier des paroles de dieu.
Exégète du Coran, Shahrour a estimé qu’on se basant sur le Fikh (la jurisprudence) adopté depuis plusieurs siècles, la Tunisie a enfreint la charia, et s’est éloignée des principes énoncés par les Oulémas tels que Chafii, Jaâfer Sadok et Al Boukhari. En revanche, si on se base sur le texte coranique, on se rend compte que la Tunisie a bel et bien respecté le texte divin et ne s’est pas écartée de l’Islam.
L’auteur a mis en relief cette hypothèse en se basant sur des versets coraniques et des arguments clairs, inspirés de l’Islam. Il a, en effet, présenté une nouvelle lecture du Coran. Par exemple, au sujet du mariage avec un non-musulman, Shahrour a considéré le fait que l’Islam définit le mariage comme étant une union basée sur l’affection et la miséricorde, et ce en se référant au verset 21 de la Sourate Al Roum qui dit: “Et parmi ses signes il a créé de vous, pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et il a mis entre vous de l’affection et de la miséricorde. Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent”.
Plus encore, il a souligné que d’après le verset 221 de la Sourate Al Baqara, le mariage avec ceux qui ne croient pas en dieu concerne également les hommes. Selon ce verset, même l’homme n’a pas le droit d’épouser une “mécréante”.
Quant au sujet de l’héritage, Shahrour a considéré qu’il est plus judicieux de recourir au testament. Il a indiqué que le principe du transfert de patrimoine entre les générations doit se baser sur la volonté de chacun, suivant sa situation. “Et de cette manière, on garantit ‘la justice’ dans chaque famille” a-t-il estimé.
Mohamed Shahrour, a souligné la nécessité d’adopter une nouvelle lecture, contemporaine, du Coran et d’arrêter avec les interprétations établies par des penseurs du 8ème et 9ème siècle. “Chaque époque a sa lecture, et la lecture évolue avec le temps” a-t-il noté en précisant que la situation de la femme a tellement changé ces derniers temps.
“Alors, je félicite le peuple tunisien de cette réalisation, je suis heureux de cette lueur d’espoir, même si la route est épineuse, mais les gens doivent se réveiller après un certain temps” a-t-il conclu.
Très critique vis-à-vis de l’interprétation jurisprudentielle du Coran perpétuée dans la tradition arabo-musulmane, Mohamed Shahrour défend une vision de l’Islam en rupture avec l’interprétation classique. Ce qui lui vaut les foudres des traditionalistes dont certains le déclarent apostat.