Le passage en force de Youssef Chahed dérange les partis

23/08/2016

Le gouvernement, dit d’union nationale, de Youssef Chahed n’a pas fait que des satisfaits. Alors qu’il est censé réunir toutes les parties prenantes autour d’une même équipe consensuelle, les partis écartés et autres ayant reçu des portefeuilles jugés « insuffisants », en ont profité pour critiquer une équipe qui n’a pas encore entamé son exercice.

 

L’équipe gouvernementale de Youssef Chahed a été présentée à Carthage le 20 août. Elle a été annoncée, lors d’une conférence de presse, comme étant « le fruit de consultations avec les partis politiques et organisations nationales de poids sur la scène tunisienne », et pourtant cette annonce en a rapidement fait jaser plus d’un. En cause, une manière de faire qui n’a pas été au goût de ceux qui sont censés y participer

La réaction du mouvement Ennahdha, l’un des deux partis forts du pays, a été sans surprises. Le Conseil de la Choura a « approuvé » le choix des ministres issus de son parti, nommés au gouvernement de Youssef Chahed. Rien d’étonnant, étant donné que le parti a activement participé aux consultations. Cependant, des réserves ont été émises sur cette composition selon Abdelkarim Harouni, président du conseil de la Choura qui a indiqué, hier, que les réserves émises « seront discutées avec le chef du gouvernement avant la présentation de sa formation devant l’ARP », le vote de confiance étant prévu lors d’une plénière vendredi 26 août.

 

Mais Ennahdha n’est pas l’unique parti à avoir émis des réserves quant à la nouvelle équipe gouvernementale. A peine officiellement annoncée, Afek Tounes, qui figure lui aussi au gouvernement via deux ministres et deux secrétaires d’Etat, a tenu un conseil national dans lequel il s’est penché sur la question de son éventuelle participation au gouvernement. A l’issue de ce CN, le parti de Yassine Brahim a expliqué avoir émis des réserves quant à la composition de cette équipe. Réserves « qui seront transmises au chef du gouvernement désigné », mentionne un communiqué qui précise, par ailleurs, qu’une réunion est prévue pour statuer définitivement sur cette participation, une fois les pourparlers achevés avec Youssef Chahed.

Yassine Brahim, président d’Afek et ministre sortant du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, a d’ailleurs critiqué sur sa page Facebook, dimanche, le fait que son parti n’ait pas été consulté avant l’annonce officielle de l’équipe Chahed. Et d’ajouter, dans des déclarations aux médias, qu’Afek émet des réserves sur certaines personnalités proposées par le chef du gouvernement d’union nationale.

 

Plusieurs partis politiques ont accueilli l’annonce du gouvernement Chahed avec une certaine froideur. Une froideur qui met à mal l’équilibre que cette nouvelle équipe tente de construire et qui est, selon certains observateurs, justifiée par la frustration due à l’éviction de certains noms, qui ne s’attendaient pourtant pas à voir leurs visages rayés du tableau. A l’instar de Yassine Brahim par exemple.

L’Union Patriotique Libre en fait notamment partie. L’UPL, qui ne compte désormais plus aucun ministre au sein du nouveau gouvernement, affirme pourtant ne pas voir été évincé,« contrairement à ce qui a été dit », mais ayant pris une décision de principe en se retirant des négociations et en ne proposant aucun CV pour l’équipe gouvernementale.

Slim Riahi, président du parti, a estimé lors d’une conférence de presse ce matin que « la qualité des pourparlers n’a pas permis de donner naissance à une équipe équilibrée et capable de relever les défis ». Tout en évoquant des tensions, il a estimé que « certaines personnes ne sont pas à leur place », sans préciser les noms de ceux visés.
Pas mieux du côté de Nidaa Tounes. Le parti politique, déjà en proie à une crise perpétuelle, a tenu une réunion tumultueuse de son bloc parlementaire, le lendemain de l’annonce du nouveau gouvernement. Sofiène Toubel, président du bloc de Nidaa, a indiqué à Mosaïque FM, dimanche, que la réunion du jour a été caractérisée par une ambiance houleuse, et ce après que 19 députés aient menacé de présenter leur démission protestant contre la composition de l’équipe gouvernementale. Il a ajouté, à la même source, qu’une délégation a été désignée pour transmettre au chef du futur gouvernement les réserves émises par les députés du bloc de Nidaa Tounes. Malgré les réserves, le parti annonce qu’il soutient, dans tous les cas de figure, le gouvernement Chahed, appelant ses députés à la discipline. Un gouvernement que Hafedh Caïd Essebsi, directeur exécutif de Nidaa, qualifie de « porteur d’espoir pour les jeunes » comptant en son sein de jeunes compétences ainsi que des femmes.

 

 

Force est de constater que la majorité des équipes participant au gouvernement Chahed ont manifesté leur insatisfaction. La rapidité avec laquelle Youssef Chahed a soumis son équipe gouvernementale à Carthage a fait jaser. Afek a critiqué la « précipitation » d’une annonce, apprise à travers les médias, et faite près de deux semaines après sa nomination par Béji Caïd Essebsi. En effet, on lui reproche d’avoir formé son équipe sans avoir obtenu l’accord de ceux qui sont censés y figurer ou, au moins, les informer de leur participation avant l’annonce faite aux médias. A l’heure actuelle, les éventuelles participations restent conditionnées par un accord définitif des partis. Un accord qui n’a pas encore été confirmé. La composition finale devra, quant à elle, passer par un vote de confiance à l’ARP vendredi. Un vote qui s’annonce, cependant, sans grande surprise.

 www.businessnews.com.tn

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