Lettre d’un professeur à ses élèves

23/08/2016

Encore un de nos enfants enterré ce matin à la fleur de l’âge. Oui, nos enfants et c’est comme cela qu’on le ressent puisque au cours de l’année, vous êtes plus avec nous qu’avec vos propres parents. On vous pleure autant car nous nous sentons également responsables. Nous aussi on s’attache à vous. On n’est pas des machines.

 

Quelque part nous avons failli. Vous êtes des élèves et notre devoir c’est de vous “élever” vers le savoir, la sagesse et la réussite dans votre vie. On veut des têtes bien faites et non des têtes bien pleines. On vous accompagne dans vos premiers pas. On vous a dit de croquer la vie, mais pas de la taquiner.

A quoi sert-il de gloser sur la mondialisation et l’histoire de la guerre froide, si vous ne savez pas que la route tue ? A quoi sert-il de faire les plus belles analyses philosophiques sur la mort ou la vie et que vous ne sachiez pas que le volant entre vos mains est en fait une arme ? A quoi sert-il que vous résolviez les problèmes mathématiques les plus compliqués, si en rentrant d’une belle soirée pleine de bonheur, vous n’osez pas dire à celui qui conduit vite, “eh, mec ralenti et arrête ta frime, notre vie est entre tes mains”.

 

Le permis de conduire que vous rêvez tous d’avoir, et c’est bien, comprend un code de la route qui n’est pas un livre de cuisine thaïlandaise. Vous devez savoir que notre pays détient le record mondial des accidents de la route. Alors arrêtez de nous faire souffrir. Arrêtez de nous faire pleurer. Soyez ces citoyens consciencieux, réfléchis et responsables que nous espérions de tous nos cœurs. Mes fortes pensées vont d’abord à ses parents, car vous devez savoir, qu’un ami c’est dans la tête qu’on l’aime, une amie c’est dans le cœur, mais les enfants c’est dans nos tripes (ma mère sans que je la comprenne à l’époque, parlait de “kibda”, un sentiment inexplicable, animal et qui vous saisit au fond de vous-même). Mais ça, vous le comprendrez demain. Adieu, mon grand Khalil. Paix à ton âme. Tu ne seras plus là où on t’a connu, mais à jamais et pour toujours, là où nous sommes.

 

Peut-on ne pas politiser les choses ? Je suis de ceux qui aiment la politique et qui pensent que tout est politique, mais voyant ce qui se passe dans ce monde de requins, jamais je ne ferais de politique. Je ne voulais pas trop politiser cette lettre, mais je ne peux m’y empêcher. Au moins pour dire deux simples mots.

 

Nos enfants se meurent sur la route. Qui est fautif ? Oui, il faut une véritable “conscience citoyenne”. Il faut de l’éducation, la compréhension et parfois aussi la peur du gendarme. Mais pour moi la faute est partagée.

On a bien parlé de nos jeunes qui ne sont pas bien conscients des dangers, mais que dire des pouvoirs publics. Est-ce que vous croyez que les flics (oui ok, pas tous !) sont de bons connaisseurs de ce fameux code de la route ? Est-ce que vous croyez qu’ils sont là pour faire respecter les règles ou pour souvent emmerder les jeunes filles et soutirer de l’argent ? Est-ce que vous croyez que les pouvoirs publics jouent bien leur rôle, eux ? Sont-ils au moins conscients de l’état réel de nos routes ? Ont-ils réparé et bien adapté l’infrastructure routière ? Sont-ils si aveugles pour ne pas voir que le parc automobile s’est fortement modifié ? Nous avons des Porsche et des BM ou je ne sais quoi, qui roulent sur des routes faites pour des 4L et des Dodoches ?

 

Ils sont au final eux les premiers coupables car c’est eux les “responsables”. La politique n’est pas seulement le sentiment enivrant d’un “petit” pouvoir insignifiant. Il faut que nos politiques aillent au charbon et par de réelles actions ils sauvent les gens…C’est le premier de leurs devoirs. Sinon qu’ils restent chez eux. Vous voyez que tout est politique !

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