L’initiative de la dernière chance !
30/06/2016
La Tunisie vit en ce moment une situation dramatique en particulier sur les plans économique et social. Au risque de lasser et de paraître crier au loup, je n’ai pas hésité à attirer l’attention sur la dégradation de la situation économique du pays. Face à la menace, le gouvernement n’a eu aucune réaction digne de ce nom ; il aura fallu la dernière initiative du président de la République pour secouer le cocotier et la somnolence de l’establishment: la mise en place d’un nouveau gouvernement d’union nationale vise à impulser une nouvelle dynamique dans le travail gouvernemental et à redonner du lustre au pouvoir exécutif pour mieux conduire le pays. Objectivement, nous devons saluer cette initiative dans la mesure où la crise économique résulte en grande partie de l’instabilité et de la mauvaise gouvernance politique du pays !
OUI donc à un gouvernement d’union nationale pour plus de consensus et de stabilité dans la gestion des affaires du pays mais NON à une nouvelle répartition des portefeuilles ministériels sur la base des intérêts partisans et des systèmes de quotas entre les partis politiques ! Aujourd’hui, la Tunisie a besoin d’une vision, d’une stratégie, d’un plan d’action, de mesures correctives concrètes mais aussi de quick-wins, d’efficience dans le travail gouvernemental, de réactivité et de capacité à donner un nouvel élan au pays. Il faut savoir donc communiquer, rassurer, reprendre la confiance des opérateurs et des citoyens, séduire, engager, faire adhérer les Tunisiens à une démarche constructive et réussir un plan de sauvetage et de relance.
Concrètement, il faut trancher une question essentielle : Faut-il conserver Habib Essid à la Primature ? Faut-il aussi garder la même structure et le même nombre de ministres ? Quid de la nouvelle feuille de route ?
S’agissant de Habib Essid, tous s’accordent à le considérer comme un homme intègre et valeureux. Pour le reste, les choses se gâtent : il communique mal, il ne rassure pas, il n’arrive pas à trancher quand il le faut et il manque de vision et de maîtrise des dossiers économiques. Habib Essid manque surtout de leadership et n’arrive pas à s’imposer comme un vrai meneur d’hommes. Et puis il y a les résultats, c’est ce qui compte le plus en politique ! 1 an et demi après sa prise de pouvoir, le bilan est franchement mauvais : une croissance molle qui n’atteint même pas un point, des déficits à tous les niveaux, un accroissement dangereux de l’endettement notamment extérieur, une chute vertigineuse du cours du dinar tunisien et un climat des affaires maussade qui décourage l’investissement. Un des maux les plus graves étant l’économie parallèle qui atteint des niveaux records et à laquelle se surajoute une corruption endémique qui coûte à la Tunisie 3 à 4 points de croissance annuellement !
Au regard de ce qui précède, un changement à la tête du gouvernement n’est plus un luxe mais une nécessité impérieuse ; il devra être compétent, bon communicant, maîtrisant les dossiers politiques et économiques, intègre, diligent, meneur d’hommes ayant une vision et un programme pour la Tunisie.
Le nouveau gouvernement doit être recentré : Une quinzaine de ministères suffira avec des secrétaires d’Etat en support et des cabinets ministériels actifs et réactifs.
Les ministres doivent être triés sur le volet sur la base d’un ensemble de qualités : patriotisme, engagement pour le pays, intégrité, compétences intrinsèques, maîtrise des techniques de communication avec un esprit politique et démocratique, et un sens de la responsabilité et de la probité.
La feuille de route du nouveau gouvernement d’union nationale pourrait tourner autour de ces cinq principaux axes :
1- Restaurer la confiance et consolider la stabilité.
2- Arrêter l’hémorragie des déficits publics.
3- Poursuivre et accélérer les réformes.
4- Mise en œuvre d’une politique de grands projets et d’investissements structurants.
5- Lutter efficacement contre la corruption et améliorer les pratiques de gouvernance et de transparence.
Nous n’avons plus droit à l’erreur car le temps presse. Le pays ne peut plus souffrir le moindre atermoiement ou retard. Il est de notre devoir de contribuer à la réussite de l’initiative présidentielle pour que le pays ne bascule pas dans l’inconnu.
* Moez Joudi est président de l’Association Tunisienne de Gouvernance (ATG)
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