Sihem Ben Sedrine fabricatrice de l’Histoire

26/03/2017

La haine n’est pas le meilleur prisme pour lire l’Histoire, la vengeance n’est pas l’encre avec laquelle on écrit l’Histoire et une plume vendue ne peut pas écrire l’Histoire. Bref, Sihem Ben Sedrine et son IVD doivent déchanter : ils ne seront jamais une source fiable pour les historiens.

 

Profitant d’une séance de témoignages publics savamment dosés, et ayant pour objectif évident le dénigrement du leader nationaliste et premier président de la République, Habib Bourguiba, la présidente de l’Instance Vérité et Dignité, Sihem Ben Sedrine a appelé les historiens à entreprendre une réécriture de l’Histoire du mouvement national sur la base des témoignages proposés par l’IVD.

Ce n’est pas tant par ignorance ou par méconnaissance des efforts des historiens spécialistes de l’histoire du mouvement national tunisien que par esprit manipulateur qui la caractérise, que la présidente de l’IVD se plait de lancer ce genre d’appel. Elle sait pertinemment qu’il y a eu certes une histoire officielle écrite et supervisée par Mohamed Sayah, qui n’est pas historien.

Mais il y a eu aussi plusieurs travaux académiques au sein de l’université tunisienne ou ailleurs, dans des universités étrangères, qui n’ont rien à voir avec la version panégyriste de l’histoire officielle. Dans ces travaux, Habib Bourguiba apparait comme il est : un grand leader nationaliste, porteur d’un projet anti colonial moderne à côté d’autres grands militants nationalistes qui ont réussi cette symbiose extraordinaire  entre le parti du destour et les différentes franges de la société tunisienne. Durant les trois décennies du règne de Bourguiba, l’université tunisienne s’est abstenue d’entreprendre des recherches historiques sur Bourguiba qui, de l’aveu de tous, n’a pas cherché à s’immiscer dans la recherche scientifique.

 

De son côté, la fondation Temimi a entrepris depuis plus de vingt ans déjà, des cycles de témoignages historiques avec des acteurs du mouvement national qui n’étaient pas tous en accord avec Bourguiba. Seulement, à l’opposé des témoignages de l’IVD, la vision critique de ces témoins de l’histoire qui se sont succédé à la tribune de la fondation Temimi,  n’a pas été maculée par la haine, l’esprit  revanchard et le règlement de compte. D’ailleurs, Abdeljelil Temimi estime, que Sihem Ben Sedrine n’a pas les qualités scientifiques et techniques (nous ajoutons les qualités morales aussi) pour manipuler les documents dans le but unique de la recherche historique.

 

Bien entendu, jusqu’en 1987, l’image de Bourguiba telle qu’elle était présentée par la version officielle est exagérée. Le Zaim, le combattant suprême était magnifié. Aujourd’hui encore, par peur et par besoin identitaire pour beaucoup, par opportunisme pour certains, le « père de la nation » est encore glorifié. Pourtant l’homme politique qui était Bourguiba était calculateur, despotique et sait se montrer violent et sans compassion avec ses adversaires allant jusqu’à ordonner leur liquidation. Les historiens, les vrais, le savent et l’ont écrit. Mais cela ne remet pas en cause le leadership de Bourguiba, car la question démocratique ne se posait pas au milieu du siècle dernier dans les mêmes termes qu’aujourd’hui ;  et parce que la violence politique n’était pas étrangère à l’éthique politique du moment.

 

Salah Ben Youssef aussi était un grand militant nationaliste dont le portrait subit, depuis quelques années, les pires défigurations par ceux qui n’ayant aucune présence dans le mouvement national, essaient de trouver des filiations et utilisent Sihem Ben Sedrine et son IVD comme fabricateurs de l’Histoire.

L’histoire, la vraie,  dit quant à elle,  que Salah Ben Youssef était aussi destourien, aussi francophone et aussi anti-zeitounien que Bourguiba. Elle dit aussi que c’est Salah Ben Youssef qui a démarré et guidé les négociations sur l’indépendance et l’autonomie interne et non Habib Bourguiba qui était exilé. Elle dit enfin que Ben Youssef n’a jamais été nationaliste arabe et que son rapprochement avec le leader égyptien Jamel Abdelnaceur s’est fait dans le cadre d’un positionnement politique au plus fort de sa rivalité avec Bourguiba sur le leadership du mouvement national tunisien.

 

Il y a gros à parier que tout en connaissant ces vérités, Sihem Ben Sedrine continuera à vouloir manipuler l’opinion publique et tenter de lui offrir une version très orientée de notre histoire nationale. Il y a gros à parier aussi, qu’elle, aussi bien que ceux qui continuent à la soutenir, ne réussiront qu’à se rendre encore plus ridicules aux yeux de l’Histoire et aux yeux de leurs contemporains.

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